Tu as peut‑être vu passer des articles inquiétants sur les « PFAS » dans l’eau du robinet. Tu as regardé ton verre d’eau, puis ton enfant, puis ton verre d’eau… et là, malaise. On boit quoi, en fait ?
Respire. On va faire le point calmement : comprendre ce que sont ces fameux PFAS, ce qu’ils font (ou pas) à la santé, et surtout comment filtrer l’eau du robinet de façon efficace et réaliste pour une famille.
Les PFAS, c’est quoi exactement (et pourquoi tout le monde en parle) ?
Les PFAS, ce sont des « substances per- et polyfluoroalkylées ». Un mot barbare pour parler de plus de 4 000 substances chimiques utilisées depuis des décennies pour rendre les produits résistants à l’eau, à la graisse et à la chaleur.
On les trouve notamment dans :
- les poêles antiadhésives (type Téflon, surtout les anciennes générations),
- certains emballages alimentaires (pizzas, burgers, boîtes de frites),
- certains textiles « déperlants », tapis, moquettes,
- des mousses anti‑incendie, des produits industriels, etc.
Le problème ? On les appelle les « polluants éternels » parce qu’ils se dégradent très lentement dans l’environnement. Ils s’accumulent dans l’eau, les sols, les organismes vivants… et donc dans notre corps.
Les autorités sanitaires (en Europe et ailleurs) surveillent de près certaines familles de PFAS car, en cas d’exposition prolongée et à certaines doses, ils sont suspectés d’être associés à :
- des perturbations hormonales,
- des problèmes de fertilité,
- une baisse de la réponse immunitaire,
- des effets sur le foie et le cholestérol,
- un risque accru de certains cancers (rein, testicule…).
Est‑ce que boire un verre d’eau du robinet te met en danger immédiat ? Non.
Est‑ce qu’on a intérêt à limiter l’exposition chronique de toute la famille, surtout des enfants et des femmes enceintes ? Oui, clairement.
L’eau du robinet est-elle « dangereuse » pour les enfants ?
En Europe, l’eau du robinet est très contrôlée. Dans de nombreuses communes, elle respecte les nouvelles normes sur certains PFAS. Le souci, c’est que :
- les analyses ne couvrent pas toujours tous les types de PFAS,
- il peut y avoir de gros écarts d’une région à l’autre,
- les normes officielles évoluent au fur et à mesure que les études avancent.
On n’est pas dans un scénario catastrophe, mais plutôt dans une logique de « précaution intelligente » : réduire ce qu’on peut, là où c’est simple et accessible.
Et l’eau, c’est une des expositions les plus régulières : plusieurs verres par jour, tous les jours, pendant des années. D’où l’idée de mieux la filtrer.
Les fausses « bonnes idées » pour purifier l’eau à la maison
Avant de parler des solutions qui marchent, petit tour de ce qui ne suffit pas (ou pas vraiment).
- Faire bouillir l’eau
Ça tue les microbes, oui. Mais pour les PFAS (et la plupart des polluants chimiques), aucun intérêt. Au contraire, si de l’eau s’évapore, certains contaminants peuvent se retrouver plus concentrés. - Mettre l’eau au frigo dans une carafe en verre
C’est agréable à boire, ça change le goût « chloré », mais ça ne filtre absolument pas les PFAS. - Les petites « pierres minérales » ou gadgets magiques
Tu as peut‑être vu passer des pierres, vortex, aimants, etc. qui « restructurent » l’eau. Pour les PFAS, on est sur du zéro preuve scientifique.
Donc si ton objectif est clairement de réduire les PFAS, il faut un système avec une vraie capacité de filtration chimique, pas juste un changement de goût.
Les options vraiment utiles pour filtrer les PFAS à la maison
Bonne nouvelle : il existe des solutions accessibles, sans transformer ta cuisine en laboratoire. On va faire le tri ensemble.
Option 1 : la carafe filtrante (la plus connue)
Tu en as sans doute déjà eu une dans ta cuisine. Les carafes filtrantes utilisent généralement du charbon actif, parfois combiné à une résine échangeuse d’ions.
Pour les PFAS :
- le charbon actif peut réduire une partie de certains PFAS,
- mais l’efficacité dépend énormément de : la marque, le modèle, le temps de contact avec l’eau, la fréquence de changement de la cartouche.
En clair : toutes les carafes ne se valent pas. Et beaucoup n’ont aucune certification spécifique pour les PFAS.
Avantages :
- prix d’achat bas (20–40 € la carafe),
- installation zéro bricolage,
- améliore souvent le goût de l’eau (chlore).
Inconvénients :
- efficacité limitée et variable sur les PFAS,
- cartouches à changer très régulièrement (tous les mois environ),
- risque de prolifération bactérienne si la carafe n’est pas bien entretenue.
Pour qui ? Pour les familles qui veulent un petit mieux sans gros budget, en attendant mieux ou en complément. Mais si ton objectif numéro 1, c’est vraiment les PFAS, ce n’est pas la solution la plus robuste.
Option 2 : le filtre sur robinet ou sous évier (charbon actif hautes performances)
On monte en gamme, mais on reste dans quelque chose de réaliste pour une famille.
Il existe deux grandes variantes :
- Filtre sur robinet : une petite cartouche qui se fixe directement sur le robinet de la cuisine.
- Filtre sous évier : une cartouche (ou plusieurs) installée sous l’évier, avec un robinet dédié ou un système intégré.
Les systèmes les plus intéressants contre les PFAS combinent :
- charbon actif de haute qualité (souvent en bloc compact plutôt qu’en granulés),
- parfois d’autres médias filtrants pour les métaux lourds, les pesticides, etc.
Ce qu’il faut regarder de près :
- la présence d’une certification indépendante (par exemple NSF/ANSI 53 ou 58, ou un équivalent européen) mentionnant clairement les PFAS,
- la capacité du filtre (nombre de litres avant changement de cartouche),
- le débit (pour éviter de remplir ta casserole de pâtes en 20 minutes).
Avantages :
- excellente réduction de nombreux polluants (chlore, certains pesticides, certains PFAS, métaux…),
- coût long terme plus intéressant qu’on ne le pense (on en reparle juste après),
- pas besoin de porter des packs d’eau.
Inconvénients :
- un peu de bricolage pour la version sous évier (souvent faisable soi‑même, mais demande 30–60 minutes),
- cartouches à changer tous les 6–12 mois (selon usage).
Pour qui ? Pour les familles qui veulent une solution sérieuse, durable, sans partir dans des systèmes industriels. C’est souvent le meilleur compromis « efficacité / prix / praticité ».
Option 3 : l’osmoseur (osmose inverse)
L’osmose inverse, c’est un peu le « gros bras » de la filtration. L’eau passe à travers une membrane extrêmement fine qui retient une grande partie des molécules indésirables, y compris beaucoup de PFAS.
En général, ces systèmes se placent sous l’évier et comprennent plusieurs étapes : pré‑filtration, membrane d’osmose, post‑filtration.
Avantages :
- réduction très importante de multiples polluants (PFAS, nitrates, métaux lourds, etc.),
- eau très pure, souvent utilisée pour les préparations pour nourrissons (avec avis médical si doute).
Inconvénients :
- coût plus élevé à l’achat (souvent 250–600 €),
- gaspillage d’eau (une partie de l’eau est rejetée avec les contaminants),
- eau très pauvre en minéraux, ce qui peut nécessiter une reminéralisation ou un mélange avec une partie d’eau non osmosée.
Pour qui ? Pour les familles très exposées (zone industrielle, inquiétude documentée) ou celles qui veulent le niveau de filtration maximum possible à la maison et ont le budget adapté.
Et l’eau en bouteille dans tout ça ?
Spontanément, beaucoup de parents se tournent vers l’eau en bouteille « pour être tranquilles ».
Quelques points à garder en tête :
- les eaux minérales sont contrôlées, mais ne sont pas toutes exemptes de PFAS ou autres polluants,
- le plastique peut relarguer d’autres substances (surtout si stocké au chaud),
- coût élevé à long terme, surtout pour une famille de 3–4 personnes,
- impact écologique important (plastique, transport).
Tu peux bien sûr en utiliser (par exemple pour les biberons si ton pédiatre le recommande). Mais comme solution unique sur le long terme, ce n’est ni la plus économique ni la plus simple à gérer au quotidien.
Combien ça coûte vraiment de filtrer l’eau pour une famille ?
Petit calcul très concret, parce qu’on a tous un budget à tenir.
Prenons une famille de 4 qui boit et cuisine avec de l’eau filtrée :
- Eau en bouteille :
- environ 3 L/jour/personne (boisson + cuisine) → 12 L/jour,
- soit environ 360 L/mois,
- à 0,30 €/L (prix moyen d’une eau de source en pack) → 108 €/mois,
- soit plus de 1 200 €/an.
- Filtre sous évier de bonne qualité :
- achat du système : 150–250 € (une fois),
- cartouche annuelle : 60–100 €,
- eau du robinet : quelques centimes par m³, donc négligeable à l’échelle familiale.
Sur 3 ans, le filtre l’emporte largement sur l’eau en bouteille. Et tu t’évites les packs à porter, stocker, recycler.
Comment choisir un filtre adapté à ta famille (sans y passer des nuits) ?
Pour t’éviter de lire 40 fiches techniques incompréhensibles, voici une petite check‑list :
- 1. Regarder si les PFAS sont explicitement mentionnés
Sur le site ou la boîte, il doit être écrit clairement : réduction des PFAS, ou le nom de certains d’entre eux (PFOS, PFOA, etc.). Si ce n’est pas indiqué, prudence. - 2. Chercher une certification indépendante
Par exemple NSF/ANSI, ou un équivalent sérieux. L’idée : ne pas juste croire la marque sur parole. - 3. Vérifier la capacité du filtre
Si tu dois changer la cartouche tous les 2 mois pour une famille, ce sera vite pénible et coûteux. Regarde le nombre de litres indiqué et compare avec ta consommation estimée. - 4. Tenir compte de ton logement
En location, tu privilégies peut‑être un filtre sur robinet ou une carafe haut de gamme. En maison, un système sous évier ou un osmoseur peut être plus intéressant. - 5. Vérifier l’entretien
Changement des cartouches simple ? Pièces faciles à trouver ? Tutoriels disponibles ? Tu veux un truc que ton toi‑du‑soir‑à‑21h30 puisse gérer sans crise de nerfs.
Mettre l’eau filtrée dans ta routine familiale (sans y penser)
Le but, c’est que ce soit simple. Si c’est compliqué, on lâche l’affaire au bout de 3 semaines (je parle aussi de moi ici).
Quelques idées concrètes :
- Installer le filtre à l’endroit le plus utilisé
En général : l’évier de la cuisine. C’est là qu’on remplit les verres, les gourdes d’école, les casseroles, les biberons. - Prévoir une « station eau »
Une grande carafe ou une bonbonne en verre que tu remplis chaque matin avec de l’eau filtrée. Tout le monde sait où se servir, même les enfants. - Bloquer dans ton agenda le changement de cartouche
Un rappel tous les X mois sur ton téléphone : « Changer filtre eau ». Comme pour le contrôle technique, mais version cuisine. - Impliquer les enfants
Leur expliquer simplement : « On a installé un filtre pour avoir une eau plus propre pour notre corps. C’est ce robinet‑là / cette carafe‑là qu’on utilise pour boire. » Les enfants adhèrent souvent très bien quand on leur parle « super pouvoirs du corps ».
Filtrer l’eau, c’est une pièce du puzzle… pas toute l’image
C’est important de garder la tête froide. Oui, les PFAS posent question. Oui, filtrer l’eau est un geste qui a du sens, surtout pour les enfants.
Mais ce n’est qu’un élément parmi d’autres :
- éviter les poêles rayées anciennes générations et privilégier l’inox ou la céramique,
- limiter certains emballages gras en fast‑food (souvent traités),
- aérer régulièrement la maison,
- privilégier des produits ménagers simples (bicarbonate, vinaigre, savon noir…).
Tu n’as pas à tout faire parfaitement. Chaque petit pas compte. Installer un filtre sur l’eau que toute la famille boit quotidiennement, c’est déjà un gros morceau de gagné.
Ce que tu peux faire dès cette semaine
Pour finir sur du très concret, voici un mini plan d’action réalisable, même avec un planning de parent déjà bien chargé.
- 1. Vérifier les infos de ta commune
Regarde le rapport annuel de qualité de l’eau (souvent disponible sur le site de ta ville ou de ton distributeur d’eau). Même si les PFAS ne sont pas toujours détaillés, ça donne déjà une idée générale. - 2. Décider d’un budget réaliste
Exemple : « Je peux mettre 150 € maintenant et 70 € par an ensuite ». Ça t’aidera à trier les options. - 3. Choisir un type de système
Si tu veux du simple et efficace : vise un bon filtre sous évier ou sur robinet avec charbon actif haute performance et certification. Si tu es dans une zone très polluée ou très anxieuse sur le sujet : regarde les osmoseurs certifiés. - 4. Installer et intégrer dans la routine
Remplir chaque matin la carafe, rappeler à tout le monde quel robinet utiliser, mettre un rappel pour le changement de cartouche. - 5. Te féliciter (vraiment)
Tu viens de sécuriser une exposition quotidienne pour toute ta famille. Ce n’est pas visible comme une nouvelle déco ou une poussette dernier cri, mais sur la santé à long terme, ça pèse lourd.
Être parent aujourd’hui, c’est jongler avec mille infos, souvent anxiogènes. Tu ne peux pas contrôler le monde entier, mais tu peux améliorer l’environnement de ton salon, de ta cuisine, de tes verres d’eau.
L’idée n’est pas de vivre dans la peur des PFAS, mais de faire, à ton rythme, des choix un peu plus protecteurs pour la santé de ta famille. Verre d’eau après verre d’eau.